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> Des neuromodulateurs cholinergiques |
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On ne connaît actuellement que 10 substances ayant des propriétés neuromodulatrices cholinergiques positives. Certaines d'entre elles sont synthétisées en laboratoire et d'autres proviennent de source naturelle. Chacune a sa façon, son art de neuromoduler. |
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Sommaire > Article 1 > Article 2 > Article 3 > Article 4 Alzheimer: terrible mort neuronale > Article 5 > Article 6 > Article 7 > Article 8
Définitions Acétylcholine: Neurotransmetteur utilisé par les neurones cholinergiques. Il est grandement impliqué dans les processus de mémorisation. Sa quantité diminue lors du vieillissement et de la maladie d'Alzheimer.
Bêta-amyloïde: Peptide dérivé de l'APP (Amyloid Protein Precursor). Il s'accumule autour des neurones cholinergiques dans la maladie d'Alzheimer. Il abaisse leur taux d'acétylcholine et à plus long terme, les endommage.
Neuromodulateur cholinergique
positif: Substance
capable d'augmenter la quantité d'acétylcholine disponible et/ou d'augmenter
l'efficacité
Aricept: Seul médicament dans le traitement de la maladie d'Alzheimer au Canada. Neuromodulateur cholinergique positif faisant partie de la famille des inhibiteurs de l'acétyl cholinestérase. Il empêche la dégradation de l'acétylcholine.
Inhibiteur de l'acétyl cholinestérase: Substance neuromodulatrice cholinergique positive inhibant la dégradation de l'acétylcholine.
Récepteur muscarinique: Récepteur à l'acétylcholine ayant comme agoniste la muscarine. Grandement impliqué dans les processus de mémorisation, son activation permet de réduire la production de la bêta-amyloïde.
Choline acétyl- transférase: Enzyme qui permet de fixer à nouveau les molécules d'acétyl et de choline ensemble en acétylcholine suite à leur séparation par l'acétyl cholinestérase.
Récepteur nicotinique: Récepteur à l'acétylcholine ayant comme agoniste la nicotine. Impliqué dans les processus de mémorisation, il est moins activé lors du vieillissement et de la maladie d'Alzheimer.
Agoniste:
Substance qui entraîne l'activation d'un ré- |
75%
des personnes âgées présentent une importante baisse en acétylcholine,
- ce neurotransmetteur permettant le stockage des informations - particulièrement chez
les neurones cholinergiques de l'hippocampe. Lorsque la diminution en acétylcholine est
marquée, la bêta-amyloïde, la
substance caractéristique de la maladie d'Alzheimer, s'accumulerait plus facilement.
Cette substance cause deux problèmes majeurs. 1) En premier lieu, la bêta-amyloïde, par
ses propriétés neuromodulatrices cholinergiques négatives, provoque une baisse encore
plus importante du taux d'acétylcholine qui peut atteindre les 90 %. Moins il y a
d'acétylcholine et plus la bêta-amyloïde est apte à s'accumuler davantage. Les
neurones cholinergiques n'ont donc presque plus d'acétylcholine, ils communiquent alors
difficilement avec les autres neurones et la mémorisation est affectée. 2) Après avoir
entraîné cette réduction de la quantité d'acétylcholine, la bêta-amyloïde attaque
par la suite les neurones cholinergiques en libérant des radicaux libres. Des millions de
ces neurones seront endommagés et non remplacés. La recherche fonde actuellement
beaucoup d'espoir sur des substances dites neuromodulatrices cholinergiques positives
capables d'accroître la quantité d'acétylcholine disponible et/ou d'augmenter
l'efficacité de la transmission synaptique cholinergique. Ces substances ont donc la
capacité de réduire ou de renverser le premier problème causé par la bêta-amyloïde:
la baisse en acétylcholine. Malheureusement, aucune d'entre elles n'agit également sur
le deuxième problème de la maladie d'Alzheimer: la dégénérescence et la mort
neuronales. Nous ne connaissons actuellement que dix substances dotées de propriétés neuromodulatrices cholinergiques positives.
Ces substances ne sont pas une cure à la maladie d'Alzheimer et elles n'agissent pas sur
les deux problèmes majeurs de la maladie mais elles permettent quand même de traiter les
premiers symptômes touchant la mémoire durant les premières années de la maladie.
Certaines d'entre elles sont synthétisées en laboratoire, d'autres sont d'origine
naturelle. 1) L'Aricept
(donépezil hydrochloride) est le seul médicament à être approuvé pour la
commercialisation au Canada dans le traitement symptômatique de la maladie d'Alzheimer.
Il fut accepté en août 1997. Il est commercialisé par Pfizer. L'Aricept est un
neuromodulateur cholinergique positif et fait partie de la famille des inhibiteurs de l'acetylcholinestérase. Il
permet en effet d'inhiber l'action de l'acetylcholinestérase, enzyme qui s'occupe
normalement de dégrader l'acétylcholine suite à une transmission synaptique
cholinergique dans le but de laisser la place à une nouvelle transmission synaptique
éventuelle. Cette stratégie visant à conserver davantage d'acétylcholine est très
ingénieuse: puisqu'il y a moins d'acétylcholine chez les neurones cholinergiques du
cerveau des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, pourquoi ne pas inhiber sa
dégradation! Durant les premières années de la maladie d'Alzheimer, l'Aricept peut
être très efficace à ralentir l'apparition des troubles de mémoire importants. Selon
Pfizer, 80% des patients qui l'ont essayé lors des études cliniques ont bénéficié
d'une amélioration ou d'une stabilisation de leurs symptômes. L'étude a cependant été
faite sur six mois seulement et 60 % du groupe placebo ont démontré les mêmes effets,
suggérant que l'échantillonnage n'était pas parfaitement adéquat. L'étude a
démontré également quelques effets secondaires liés à la prise de l'Aricept:
nausées, diarrhée, insomnie, vomissements, crampes musculaires, fatigue et perte
d'appétit. Ces effets se sont cependant souvent dissipés avec la poursuite du
traitement. Puisque l'Aricept (tout comme les autres neuromodulateurs cholinergiques
positifs connus) n'agit pas sur la dégénérescence et la mort des neurones, à plus long
terme, il reste donc un médicament dont le principal effet est de retarder l'apparition
des troubles cognitifs. L'Aricept fut le premier et est le seul médicament dans le
traitement de l'Alzheimer accepté au Canada. Au Étas-Unis cependant, la Tacrine fut le
premier médicament à être accepté par la Food and Drug Administration. 2) La Tacrine
(tétrahydroaminoacridine) est distribuée sous le nom de Cognex et est fabriquée par
Parke-Davis. Elle fut acceptée comme médicament en septembre 1993. La Tacrine est
également un inhibiteur de l'acetylcholinestérase qui empêche la dégradation de
l'acétylcholine. La Tacrine a fait l'objet d'essais cliniques à travers le monde. Les
résultats démontrent une amélioration des facultés mentales chez certaines personnes
mais une absence d'effet chez d'autres. De plus, les améliorations rapportées
s'amoindrissent après environ 24 semaines de traitement. Cela suggère encore une fois
que ce neuromodulateur n'est pas à la fois neuroprotecteur: il ne ralentit ou ne stoppe
pas la dégénérescence neuronale. Les neurones cholinergiques ont donc une plus grande
quantité d'acétylcholine grâce à la Tacrine mais sont quand même attaqués par les
radicaux libres libérés par la bêta-amyloïde. La Tacrine cause des effets secondaires
plus importants que l'Aricept. Elle cause encore une fois les nausées, vomissements,
diarrhée
mais est, en plus, toxique pour le foie. Un contrôle sanguin régulier
pour vérifier la quantité des enzymes hépatiques (qui démontre s'il y a des dommages
au foie) doit donc être jumelé à la prise de la Tacrine. Au Canada, la Direction
générale de la protection de la santé (DGPS) de Santé Canada effectue actuellement une
évaluation des résultats des recherches. L'utilisation du produit au Canada n'a donc pas
encore été approuvée. Trois autres produits neuromodulateurs cholinergiques positifs et
faisant partie de la famille des inhibiteurs de l'acétyl cholinestérase font l'objet
présentement de tests cliniques à travers le monde: 3) l'Eptastigmite produit par la
compagnie Mediolanum Pharmaceuticals, 4) la Galanthamine, produite par les laboratoires
Hoechst Marion Roussel ainsi que 5) la Metrifonate produite par Bayer. Notons que la
Metrifonate de Bayer est présentement sous études par la Food and Drug Administration
dans le but d'être acceptée. Une étude menée en 1996 durant 3 mois seulement démontra
des effets bénéfiques de ce médicament. Cependant, la Metrifonate a provoqué chez
certaines personnes des paralysies respiratoires. En plus de ces 5 inhibiteurs de
l'acétylcholinestérase, 3 autres produits neuromodulateurs cholinergiques positifs sont
synthétisés en laboratoire. 6) Le AF 102B est présentement à la dernière phase des
études cliniques. Il est agoniste des récepteurs
muscariniques. Il permet donc d'activer plus facilement les
récepteurs: la transmission synaptique cholinergique augmente donc en efficacité. Cette
stratégie est encore une fois très ingénieuse: puisqu'il manque d'acétylcholine,
pourquoi ne pas faciliter sa réception sur les récepteurs! Puisque les récepteurs
muscariniques sont plus facilement activés, il y a plus de sAPP fabriqué (voir article
Bêta-amyloïde: un neuromodulateur négatif) et donc moins de bêta-amyloïde libérée.
Des études ont en effet démontré que le AF 102B a des propriétés neurotrophiques,
possiblement dû à la plus grande libération de sAPP. Les effets secondaires liés à la
prise de ce produit ne sont pas encore connus puisque les tests cliniques ne sont pas
terminés. 7) L'ENA-713 (Rivastigmine) est commercialisé par Novartis. Ce produit est en
attente d'être accepté par la Food and Drug Administration. Ce neuromodulateur
cholinergique positif augmente l'efficacité des choline
acétyltransférases. Puisque l'efficacité de ces enzymes s'occupant
de fabriquer l'acétylcholine est augmentée, la quantité d'acétylcholine est par le
fait même accrue! De plus, ce produit est également un inhibiteur de l'acétyl
cholinestérase: il empêche la dégradation de l'acétylcholine. Il agit donc sur deux
sites au lieu d'un seul, pour augmenter la quantité d'acétylcholine: son art de
neuromoduler est très intéressant! Durant les test cliniques, ce produit a cependant
démontré des effets secondaires similaires à ceux de l'Aricept: nausées, vomissements,
diarrhée
etc. 8) Finalement, le dernier neuromodulateur cholinergique positif
synthétisé en laboratoire est la Linopirdine fabriquée par les Laboratoires DuPont
Merck. Ce neuromodulateur augmente la quantité d'acétylcholine libérée en laissant les
récepteurs à potassium des terminaisons axonales fermés plus longtemps (voir article:
La brique du cerveau). Puisque les ions potassium (qui sont positifs) restent plus
longtemps à l'intérieur du neurone, les charges positives demeurent plus longtemps à
l'intérieur: la dépolarisation est donc plus longue, les canaux calcium sont ouverts
plus longtemps et une plus grande quantité d'acétylcholine est libérée! L'art de
neuromoduler de la linopirdine est encore une fois très ingénieux. Celle-ci agit cette
fois présynaptiquement, dans le but d'intensifier les messages arrivant aux boutons
synaptiques pour augmenter la quantité d'acétylcholine libérée! La linopirdine fait
l'objet des dernières phases de tests cliniques. Pour l'instant, ce produit semble
démontrer peu d'effets secondaires et semble très efficace pour ralentir l'apparition
des troubles de mémoire durant les premières années de la maladie d'Alzheimer. 9) L'Huperzine A est un alcaloïde contenu dans la plante chinoise Huperzia serrata. Il est un inhibiteur de l'acétyl cholinestérase. Bien que de source végétale, ce produit démontre des effets anti acétyl cholinestérase aussi importants que ceux de l'Aricept et de la tacrine. Plusieurs recherches in vitro ont en effet démontré la puissance des propriétés anti acétyl cholinestérase de cet alcaloïde. Cette plante est consommée sous forme de tisane en Chine depuis des milliers d'années et cause peu d'effets secondaires comparativement à l'Aricept ou à la Tacrine. Des études cliniques ont commencé sur quelques échantillonnages de personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer. Selon les premiers résultats de ces études, ce produit pourrait être une bonne alternative comme traitement à court terme pour la maladie d'Alzheimer. Cependant, puisque ce produit ne démontre pas de propriétés neuroprotectrices, il n'est efficace que dans les premières années de la maladie d'Alzheimer. On pousse quand même les recherches pour en savoir davantage sur cette fascinante molécule. Les scientifiques se baseront sûrement sur la structure tri-dimentionelle de l'huperzine A dans l'élaboration d'autres neuro-modulateurs cholinergiques positifs. 10) Le dernier produit mais non le moindre, c'est la nicotine. Cette molécule contenue dans le tabac fait l'objet de nombreuses expérimentations depuis une dizaine d'années. Tous s'entendent pour dire qu'à faible dose, la nicotine est un puissant neuromodulateur cholinergique positif. Il existe deux types de récepteurs qui répondent à l'acétylcholine: les muscariniques et les nicotiniques. Les récepteurs nicotiniques, ayant comme agoniste la nicotine, sont concentrés dans la zone présynaptique des synapses. Normalement, ils sont activés par l'acétylcholine. Ces récepteurs sont liés à un canal ionique à calcium. Lorsqu'ils sont activés, ils permettent donc l'entrée de calcium dans le bouton synaptique via ce canal. L'entrée de calcium permet de dépolariser les vésicules synaptiques et de libérer les neurotransmetteurs. Dans la maladie d'Alzheimer, puisqu'il y a un manque en acétylcholine, les récepteurs nicotiniques sont moins souvent activés. Les neurones communiquent moins souvent ensemble et l'efficacité de la mémorisation est donc affaiblie. Cependant, la nicotine, agoniste des récepteurs nicotiniques, est capable, à faible dose de les activer même s'il y a un manque en acétylcholine. La transmission synaptique cholinergique utilisant les récepteurs nicotiniques est donc rétablie! À plus forte dose cependant, la nicotine ne provoque pas d'effets neuromodulateurs, suggérant que son action peut être réversible. Des recherches cliniques sont présentement menées avec la nicotine. C'est le "patch" de nicotine qui est utilisé comme mode d'administration de cette substance. Voilà donc pour ces dix neuromodulateurs cholinergiques positifs connus. Rappelons que ces substances ne sont pas la cure de la maladie d'Alzheimer, mais permettent tout de même de ralentir l'apparition des troubles cognitifs. < |
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David Laflamme, école Montcalm, expo-sciences 2000, tous droits réservés. |