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> Rapport écrit du projet |
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" Les activités cérébrales sont une géographie mouvante où les grands sites et leurs connexions sont incertains, flexibles, nomades. " Éric Fottorino, Voyage au centre du cerveau |
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Sommaire > Article 1
> Article 2
> Article 3
> Article 4 Alzheimer: terrible mort neuronale
> Article 5
> Article 6
> Article 7
> Article 8
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Notre cerveau est constitué dun million de milliards de connexions: les synapses! Ces synapses, ce sont nos 100 milliards de neurones qui les établissent entre eux. Lorsque nous mémorisons une information, la synapse entre deux neurones est renforcée: les messages y circulent mieux. Dans la maladie dAlzheimer, la transmission synaptique ainsi que son renforcement ne peuvent plus se faire adéquatement. Or, certaines substances dites neuromodulatrices positives arrivent à restaurer la transmission synaptique. Le but de ce projet est de tester les propriétés neuromodulatrices de lextrait de Ginkgo biloba (EGb 761), un des plus puissants neuroprotecteurs in vitro. Problématique: Les neurones communiquent sans cesse entre eux via leurs synapses par la libération de substances chimiques: les neurotransmetteurs. Il existe différents types de neurotransmetteurs, chacun concentré dans une zone précise du cerveau. Les neurones cholinergiques (utilisant lacétylcholine comme neurotransmetteur) se retrouvent dans lhippocampe, zone mémoire du cerveau. Leur rôle: permettre de stocker les informations à long terme dans lensemble du cerveau. Cest à ces neurones cholinergiques de lhippocampe que la maladie dAlzheimer sattaque principalement. En effet, cette maladie entraîne laccumulation de dépôts dune subs- tance neuromodulatrice négative et toxique nommée b -amyloïde autour de ces neuro- nes. Cette substance cause deux problèmes majeurs: 1) en premier lieu, elle abaisse jusquà 90% de leur taux dacétylcholine de sorte quils ne peuvent plus communiquer avec les neurones de lensemble du cerveau: la mémorisation ne peut plus sétablir ; 2) en second lieu, elle attaque les neurones par un processus encore inconnu détruisant des millions de neurones cholinergiques. Or, de récentes études ont prouvé que létrange accumulation de b -amyloïde pourrait être causée par un manque en acétylcholine. 75% des personnes âgées présentent une importante baisse de leur taux dacétylcholine. Lorsque la diminution est marquée, la b -amyloïde saccumulerait et entretiendrait elle-même son accumulation en abaissant davantage le taux dacétylcholine. Un axe de recherche prometteur a trait aux produits neuromodulateurs cholinergiques positifs. Ces produits favorisent la transmission synaptique cholinergique en facilitant par exemple une libération accrue dacétylcholine ou encore en ralentissant sa dégradation. Plus il y a dacétylcholine, moins il y a de déficits cognitifs et moins il y aurait de b -amyloïde présente. Actuellement, on connaît moins de dix produits dotés de propriétés neuromodulatrices cholinergiques positives. Aucun deux nagit sur le deuxième problème de la maladie dAlzheimer: la mort neuronale induite par la toxicité de la b -amyloïde. De plus, aucun test nutilisant uniquement que la mémoire nest au point pour évaluer différentes substances potentiellement neuromodulatrices cholinergiques. But: Dans ce projet, jai voulu déterminer si lextrait de Ginkgo biloba possède des propriétés neuromodulatrices cholinergiques positives en testant sa capacité à restaurer la transmission synaptique chez des rats préalablement soumis à leffet provisoire dun inhibiteur de la transmission synaptique cholinergique (scopolamine). Hypothèse: Certains extraits dorigine végétale comme le millepertuis ou la nicotine ont dimportantes propriétés neuromodulatrices positives (respectivement sur la dopamine et sur lacétylcholine). Lextrait de Ginkgo biloba, le plus puissant produit neuroprotecteur in vitro connu jusquici contre la toxicité induite par la b -amyloïde, pourrait montrer des propriétés neuromodulatrices cholinergiques positives. Expérimentation: Lexpérimentation a eu lieu à lHôpital Douglas affilié à lUniversité McGill. Elle consiste en un test de reconnaissance dobjet effectué sur des rats. Ce test a lavantage de ne causer aucun stress aux rats car il utilise le réflexe dexploration inné chez cet animal. Le test étant effectué comme tel pour la première fois, jai dû en élaborer dabord lensemble des paramètres. Cette première phase est cruciale et représente environ 90% du travail dexpérimentation. Le test peut se résumer ainsi. Durant une journée, chacun des rats dun groupe de 24 shabitue à une petite chambre de 45cm X 45 cm: cest la stabulation. Le jour suivant, deux objets identiques sont placés dans la chambre et chacun des rats a deux minutes pour les explorer: cest la séance dapprentissage. Une heure plus tard, un des deux objets identiques est remplacé par un nouvel objet et chacun des rats a encore deux minutes pour les explorer: cest la séance de reconnaissance. Les temps sur lesquels les rats passent à explorer lancien et le nouvel objet sont mesurés. Les rats dont la mémoire est intacte passent définitivement plus de temps à explorer le nouvel objet lors de la séance de reconnaissance. Plus de 50 variables sont à contrôler pour garantir la fiabilité des résultats: âge des rats, saturation en odeur, moment de la journée, luminosité, durée du temps de stabulation / apprentissage / reconnaissance, couleur des objets, dimension de la chambre, présence ou non de lexpérimentateur, etc. Jai répété 9 fois cette étape avec des rats contrôle (nayant reçu aucune substance) afin de mettre en place les conditions dexpérimentation adéquates. Je pouvais alors procéder au test avec le Ginkgo biloba. Le même test est effectué sur un groupe de 24 nouveaux rats divisé en 3 sous-groupes. Les groupes #1 et #2 reçoivent une injection de 0,2 mg/kg de scopolamine 30 minutes avant la séance dapprentissage. Cet alcaloïde de la plante Scopolia carniolica inhibe temporairement la transmission synaptique cholinergique à la manière de la maladie dAlzheimer et empêche la mémorisation pour un court laps de temps. Le groupe #2 reçoit en plus une injection de 200 mg/kg de Ginkgo biloba. Le groupe #3 reçoit quant à lui une injection deau saline et agit comme contrôle. Ce test avec lextrait de Ginkgo biloba a été répété 3 fois pour valider les résultats. Les données obtenues ont permis de confirmer mon hypothèse. Dans le but de déterminer avec une plus grande exactitude le niveau defficacité des propriétés neuro-modulatrices cholinergiques positives du Ginkgo biloba, jai voulu par la suite pousser davantage lexpérimentation. Il fallait consolider deux paramètres en particulier, cest-à-dire préciser plus finement le dosage de la scopolamine et lintervalle entre linjection et lapprentissage. En effet, lors du test avec le Ginkgo biloba, la dose de 0,2 mg/kg de scopolamine 30 minutes avant lapprentissage ne bloquait pas en totalité la mémorisation: la transmission synaptique cholinergique nétait pas parfaitement inhibée. Je veux donc massurer que la transmission cholinergique de tous les rats soit bloquée temporairement à 100% par la scopolamine. Le contrôle total de ces deux éléments lors du test final sur le Ginkgo biloba permettra alors de rendre compte encore plus exactement du niveau defficacité des propriétés neuromodulatrices du produit (faibles / moyennes / fortes).Résultats et analyse: La phase délaboration du protocole a été répétée 9 fois et lensemble des paramètres a été établi. Par exemple, après avoir contrôlé les variables, les rats passaient autant de temps lors de lapprentissage à explorer lobjet de gauche que celui de droite (graphique 1) indiquant quils navaient pas de préférence spatiale. Si tel avait été le cas, des sources de biais auraient pu sinfiltrer lors de la reconnaissance : les rats explorant par exemple davantage lobjet de gauche. Également, après avoir ajusté les variables, les rats contrôles passaient davantage de temps (± 8 secondes) à explorer le nouvel objet lors de la reconnaissance peu importe son emplacement, sa taille, sa couleur, etc, indiquant que le test fonctionne. Par la suite, le test du Ginkgo biloba a été répété 3 fois. Un peu plus de la moitié des 24 rats injectés uniquement à la scopolamine (0,2 mg/kg) montrèrent des déficits mnésiques importants: ils passaient autant de temps sur les deux objets lors de la séance de reconnaissance. Le reste du groupe montra cependant des déficits moins évidents, suggérant que la dose nétait pas tout à fait optimale. Les 24 rats injectés à la scopolamine et au Ginkgo biloba (200 mg/kg) ne manifestèrent quant à eux, aucun déficit mnésique (par rapport aux contrôles) ce qui révèle que le Ginkgo biloba a réussi à renverser complètement leffet neuromodulateur cholinergique négatif de la scopolamine par ses propriétés neuromodulatrices positives (graphique 2). Il aurait donc restauré la transmission synaptique des neurones cholinergiques de lhippocampe soit en facilitant la libération |
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L'art de neuromoduler! > Rapport écrit du projet
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d'acétylcholine,
en ralentissant sa dégradation ou encore en favorisant sa réception. Ces résultats
très intéressants confirment mon hypothèse de départ et répondent au but de ma
recherche. Maintenant, les essais en vue de parvenir à la dose de scopolamine optimale et
à l'intervalle idéal entre l'injection et l'apprentissage progressent régulièrement en
vue du test final. Il semblerait que 0,2 mg/kg de scopolamine injecté 1 minute avant la
séance d'apprentissage ou encore 0,4 mg/kg injecté 30 minutes avant causeraient une
amnésie encore plus importante que celle obtenue avec 0,2 mg/kg 30 minutes avant (graphique 3).
Cela confirmerait l'effet amnésique de très courte durée de la scopolamine. Lorsque ces
facteurs seront complètement maîtrisés et validés, le test final du Ginkgo biloba
viendra fournir le degré précis d'efficacité des propriétés neuromodulatrices du
produit que le test initial a déjà établies. "Tout ce que l'on peut imaginer existe." Pablo Picasso |
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David Laflamme, école Montcalm, expo-sciences 2000, tous droits réservés. |